jeudi 9 juillet 2015

Étape 6 : la chute de l'impérial germanique

Abbeville-Le Havre, de la belle ville au havre de paix, le peloton a musardé de musette en musette jusqu’à la fin du bal au bord des docks, où le poids et l’ennui lui ont courbé le dos.
Au départ, trois hommes se partageaient des parts de gloire. Teklehaimanot, érythréen pas éreinté par la tâche loin de ses attaches, l’Afrique noire, sur les routes d’une France noire de monde. Perrig Quémeneur, au péril de sa forme, qui compile les échappées belles, qui bouffe du vent à la pelle. Van Bilsen, délaissé par son leader blessé et lassé au bord de la route, tentant de porter une Cofidis abandonnée, dans un effort solitaire et solidaire en hommage à son général Nacer.

À l’approche des docks, Doc Martin, tout de jaune vêtu dans son solide paddock Etixx, a gardé le cap plein phare, far far away jusqu’à la flamme rouge, où l’Enfer l’a rattrapé : à vouloir jouer des coudes il s’est brisé l’épaule, à trop vouloir briller il s’est brûlé les ailes dans son excès de zèle. Zèle fracturé. Et la facture de la clavicule est corsée. Le maitre du temps ne put être maitre de son tempérament. Quelques petites côtes de porc à passer jusqu’à bon port, et c’était réglé pour le panzer, qui n’avait plus qu’à boulotter ses panzani. Et voilà qu’il broie du jaune, clavicule en écharpe et moral en berne, tristes compagnes l’obligeant à rejoindre Cancellara le bernois au panthéon des jaunes déchus et déçus.

Zdenek Stybar, quant à lui boira son champagne tiède à demi-goutte, son leader étalé sur la route lui laissant comme un nœud à l’œsophage. Le mal au cœur ce soir chez Etixx ne sera pas celui de l’ivresse mais celui de la tristesse, celle de perdre sur la route un roi soleil tombé sur le sol normand.


La garde rapprochée de Martin, entre détresse et liesse

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